Bad Enough for You | Tara

Tara se demandait si elle avait dormi, ne serait-ce même avoir fermé les yeux pendant une minute. Ses amis s’étaient rapidement inquiétés en la voyant aussi tête en l’air, ouvrant le casier d’une autre alors qu’elle jurait que c’était le sien ou bien même sursauter à chaque fois qu’une blonde passait à côté d’elle. Et pourtant, elle leur jurait que tout allait bien, qu’elle ne se droguait pas, qu’elle ne buvait pas et que non, elle ne s’était pas refait l’intégrale de Doctor Who en une soirée.

C’était un tout autre problème qui troublait la jeune fille. Alexis MacTire, cette fille qu’elle avait chassée de chez elle après l’avoir autorisé à passer la nuit chez elle. Les souvenirs l’avaient littéralement hanté. Elle ne savait pas si elle regrettait ou non sa présence ou ses actes. Les baisers et caresses échangées, les secrets dévoilés, cette promesse d’une autre nuit avec elle. Tour ça, ça l’empoisonnait un petit peu plus à chaque minute.

Elle se rendit d’un pas traînant à son cours, s’affalant presque sur la table en chassant ses cheveux bouclés qu’elle n’avait pas eu le temps de lisser. Elle pouvait déjà entendre les ricanements des filles et fils à papa non loin d’elle alors qu’elle venait à peine d’ouvrir son cahier. Elle sourit à une de ses amies qui se trouvait dans le fond avant de remarquer la présence d’Alexis un peu plus loin. Elle se figea et s’empressa de revenir droite comme un I sur sa chaise alors qu’elle sentait le rouge lui monter aux joues. Elle était là… Elle ferma les yeux pour se calmer.

Le cours se passa sans mal et elle ne put s’empêcher de jeter des regards derrière elle de temps en temps, elles n’avaient pas eu la chance de se reparler depuis. La cloche retentit et elle rangea prestement ses affaires, trop perdue pour rester une minute de plus aussi près d’elle. Hélas pour elle, à peine fut-elle sortie que les crétins de riches vinrent l’encercler. Elle les regarda tour à tour avec ce même air blasé, les laissant parler sur son dos. Les mots ricochaient sur sa carapace et elle fit signe à ses amis de l’attendre, les vipères allaient bientôt manquer de venin.

C’est alors qu’une voix se fit entendre, cette voix… Celle d’Alexis. Elle tourna un regard surpris dans sa direction alors qu’elle parlait méchamment avec l’un de ses sbires. Tara cherchait déjà à s’éclipser, esquissant quelques petits pas de côté quand une phrase vint la stopper net dans son élan.

Cette pouffiasse comme tu dis…

Tara, tu n’es pas sans importance.

Elle se souvenait de ça, oui ça elle s’en souvenait même très bien.

N’en vaut pas la peine.

Son cœur se brisa sur le coup alors que ses dernières défenses s’effondrèrent en elle, c’était comme devoir supporter un lourd poids qui venait à peine de lui tomber dessus mais elle n’avait pas la force de le porter. Elle se remémorait tout ce qui c’était dit cette nuit-là, la sincérité de la blonde, la confiance qu’elle avait failli mettre en elle… Tout ça partit en fumée. Elle n’avait pas bougé d’un pouce, ignorant carrément la phrase de la blonde. Ca faisait mal, elle n’avait jamais eu aussi mal de sa vie, pas depuis la mort de son père.

Alors que les populaires s’en allaient manger, quelque chose prit le dessus sur la douleur et la peine, quelque chose qui la mettait hors d’elle, elle ne savait pas si c’était le manque de sommeil ou le fait de s’être faite trahir de la sorte mais elle ne contrôlait plus rien. Elle était tout bonnement furieuse. Elle laissa son sac tomber au sol avant de se diriger d’un pas rapide vers la première pouffiasse qu’elle avait à porter de main. Celle-ci se retourna.

« Dégage de là l’Irlandaise. Retire tes sales pattes de là ! »

« Toi ferme-là, ta voix me donne un mal de crâne de chien. »

A peine ses mots terminés, elle lui asséna une droite monumentale avant de se mettre à califourchon sur elle et de la labourer de coups. Elle se vengeait, mais pas sur la bonne personne. Elle laissait ses coups retirer toute la peine et la colère qu’elle avait en elle. Toute cette incertitude… Des larmes de rage se mirent à couler sur ses joues alors que ses phalanges commençaient à lui faire sacrément mal.

« TARA ! Arrête ! ARRETE ! »

On la tira par les bras et elle sentit qu’on la maintenait fermement. Elle se débattait comme un beau diable alors que ses amis de longue date tentaient de la maîtriser, lui hurlant de se calmer mais elle n’en fit rien. Son regard fou de douleur et de rage était plantés sur Alexis.

« Ils doivent payer ! Ils doivent payer pour ce qu’ils me font subir ! Je ne suis pas un jouet ! »

Je peux comprendre que la mort de ton père et le départ de ta mère t’ont affecté mais quand même… Ca va pas bien ma fille, va falloir que je te trouve un psy

Sa tante avait peut-être raison.

La douleur lui vrillait les tempes et elle peinait à ouvrit sa main, elle avait frappé de toutes ses forces avec toute sa rage, désespoir appelez ça comme vous voulez.  Il régnait un véritable vide en elle alors qu’elle sentit des picotements entre ses omoplates. Son pouvoir la démangeait et elle devait se retenir fortement de ne pas l’utiliser contre ces crétins qui ne comprenaient pas la haine qu’elle ressentait contre eux.

Elle ignora le professeur, elle était comme dans un état second, elle n’entendait plus rien, observant seulement un téléphone être jeté à la poubelle. Quelqu’un la prit dans ses bras avec douceur et elle se laissa aller à cette étreinte.

« Eh Tara… Qu’est-ce qui t’a pris ? Qu’est-ce qu’ils t’ont fait pour que tu sois dans cet état ? »

Elle reconnut la voix de Brian mais sans plus, elle ne voulait pas répondre, elle voulait seulement aller se laisser mourir dans un coin. La colère était toujours là, en train de gronder au plus profond de son être, réclamant violence et vengeance mais la tristesse menait largement. Sa vie était fichue, sa tante allait être mise au courant de son débordement, informer sa mère qui la renverrait en Irlande, retourner dans ce Manoir froid et sans vie, sans aucun avenir éclatant à prévoir.

« Tara, par pitié… Réponds-nous ! Ton poing est rouge comme pas possible ! TARA ! »

Paige avait perdu son sang-froid visiblement. Mais ce fut comme un déclic pour la jeune fille qui se détacha de l’étreinte de son ami avant de les regarder tour à tour. Paige, Brian, Jefferson et Madison. Elle ouvrit la bouche pour parler avant de tourner les talons et de se mettre à courir à travers les couloirs, ignorant leurs exclamations et leur appel désespéré. Ils ne pouvaient pas la comprendre, ils ne pouvaient pas comprendre dans quel état misérable elle était. Elle avait été prête à placer sa confiance en Alexis, aveuglement.

Elle dépassa le groupe de populaires, tournant brusquement à droite, esquivant l’infirmerie et leurs expressions de surprise. Tara poussa rapidement la porte qui menait au terrain de Lacrosse et prit son raccourci pour arriver dans un coin tranquille. Elle stoppa sa course et tomba à genoux à côté d’un arbre, posant sa main dessus pour tenter de ressentir de l’apaisement ou autre sentiment qui lui ferait oublier sa douleur, sa peine, ce sentiment de trahison qui lui arrachait le cœur.

« Calme-toi… Calme-toi… Arrête de pleurer… »

Elle ferma les yeux, basculant la tête en arrière, les larmes coulant doucement sur ses joues alors qu’elle respirait doucement. Elle aurait tellement aimé que son père soit là. Que ferait-il lui ? Il pardonnerait. Non elle refusait. Et sa mère ? Que ferait sa chère et tendre mère ?

Tara quand quelqu’un blesse ton honneur ou trahit la confiance que tu as mise en lui, fais en sorte qu’il comprenne que l’on ne joue pas avec toi. La Vengeance est l’unique voix pour que tu puisses trouver la paix.

Elle baissa doucement la tête, ouvrant les yeux, la détermination y brûlait férocement.

« La vengeance est l’unique voix pour que tu puisses trouver la paix. »