Le Bal Du Renard

Elle n’avait vraiment aucune envie d’y aller, et pourtant, elle était déjà habillée, maquillée et masquée. On l’avait forcé à venir à ce Bal, parce que ces amis ne voulaient pas la voir se morfondre tout un soir à cause d’une crétine de blonde qui la rendait complètement folle, et pas dans le bon sens du terme. En une semaine, elle avait totalement changé de comportement. Passant de jeune fille toute gentille à vraie sauvage sur pattes qui n’avait que le mot vengeance sur les lèvres.

Elle attendit que son ami Brian la rejoigne sur le parking du lycée, ne voulant pas se faire crier dessus par les professeurs parce qu’elle n’avait pas de cavalier. Se retrouver à être cavalière avec un Robin des Bois alors qu’elle était en Belle, relevait du comique et du ridicule. Il finit par arriver après quelques minutes, à croire qu’il aimait la faire poireauter dans le froid. Elle lui rendit son sourire et prit son bras, avançant sur le macadam pour rejoindre l’établissement.

Ils y pénétrèrent sans un bruit, Tara n’étant pas vraiment d’humeur à faire la conversation. Elle leur en voulait de l’avoir traîner de force dans un événement qu’elle ne voulait pas. Qui plus est, Brian allait s’en aller avec Paige pour le reste de la soirée, la laissant seule dans son coin avec comme seul consolation, le punch imbuvable de la dame de cantine. Vraiment trop aimable de sa part.

Elle espérait qu’elle ne croiserait pas Alexis durant le Bal, leur conversation ne lui avait vraiment pas donné envie de la voir, mais vraiment pas. Et cette histoire de T-Shirt lui avait couru sur le haricot.
Peut-être aurait-elle la chance de croiser un visage familier qui lui voudrait du bien ? Et serait assez charitable pour passer la soirée avec elle ?

Un gars qu’elle ne connaissait absolument pas, lui fit un compliment sur sa robe noir et or qui dévoilait ses épaules nues. Elle haussa les sourcils sous son masque avant de donner un coup de coude à ce cher Brian qui s’était mis à ricaner. Ils finirent par atteindre les portes et Tara les poussa doucement en prenant une grande inspiration.

Que l’ennui commence !

Sixième café de la journée, il allait finir par s’y faire. Stiles sirotais sa tasse sur le canapé en contemplant l’écran noir de la télé d’un air absent. Ressassant encore et encore ses dernières entrevues avec Lydia dans sa chambre d’hôpital, se demandant presque si ce n’était qu’une illusion de plus. Il jeta un coup d’œil à sa montre pour vérifier l’heure pour la troisième fois depuis qu'il était assis là. Il était vraiment en retard, mais ne trouvait toujours pas le moyen de décoller du canapé. Il n'avait pas vraiment la motivation d'aller à ce bal, pas qu'il n'avait pas envie de voir Lydia, bien au contraire. En fait il ignorait la véritable raison qui le retenait là sur ce canapé, fainéantise, fatigue ou bien simplement pas l'envie. Il inspira profondément avant de finalement se redresser pour se lever, un point pour Stiles, zéro pour le canapé. Il portait un pantalon de costume noir, les cheveux en bataille, sans qu'il ne sache quoi en faire, et était toujours en chaussettes. Au diable le costume trois pièces qu'aurait pu exiger Lydia, il avait déjà fait l’effort d’enfiler une chemise blanche -qu'il avait laissé ouverte au niveau du col, abandonnant l'idée de la cravate ou du noeud papillon, qui aurait certainement pu être plus adapté à son personnage. Qu'était le chapelier sans son grand noeud pap' ? Mais il avait toujours le haut de forme noir sur lequel était épinglé la typique carte 10/6. Il l’avait d’ailleurs abandonné près de la veste de blazer qui était négligemment posée sur l’accoudoir du canapé. Il n'aurait sûrement pas besoin de cette dernière pour la soirée, il était loin de faire froid dehors. Il attrapa donc sa veste qu'il posa sur son épaule, le haut de forme noir typique du chapelier et, bien sûr, le masque sombre. Parce que c’était un bal masqué, mais Stiles voyait le côté positif de la chose, au moins on n’apercevrait pas les cernes qui lui soulignaient ses yeux marrons. « Motivation ! »

Il avait fallu débattre un long moment pour expliquer que sa cavalière était déjà à l'intérieur, et si Stiles était du genre à partir dans de longues tirades explicatives parfois, il n’avait, à ce moment-là, aucune envie de s’éterniser à l’entrée du gymnase. Certes, il n’avait pas forcément la tenue complètement adapté mais il avait tout de même fait l'effort d'abandonner ses baskets et son jean, il ne fallait pas non plus trop lui en demander. Il était également en retard, il voulait bien l'admettre, mais au moins il avait une cavalière, et pas des moindres, alors s'ils voulaient bien le laisser la rejoindre... Stiles grogna un juron alors que l'abruti débattait encore intérieurement pour savoir s'il le laisserait passer ou non. Stiles jeta un coup d’œil par-dessus l'épaule de ce dernier pour observer les alentours et c'est à ce moment qu'il aperçut un loup. Il cligna des yeux, pensant à une hallucination de sa part mais le canidé était bien là, enfin c'était surement plus un chien qu'un loup, du moins il l'espérait. Et il semblait que lorsque Stiles fit marcher l'argument du toutou présent dans la salle le garçon qui lui bloquait le passage s'était décidé à le laisser passer. Il ne quitta pas le chien-loup des yeux et lorsqu'il les remonta jusqu'à son propriétaire il fulmina, et lorsqu'il vit à qui il s'adressait Stiles avançait déjà vers eux à grandes enjambées. Stiles s'interposa entre Peter et Lydia en espérant que cette dernière n'avait pas déjà accepté la danse que lui avait proposée l'ancien alpha. « Malheureusement elle a déjà un cavalier. Et puis tu peux toujours danser avec ton toutou ! » Il désigna le chien qui se tenait à ses côtés d'un signe de tête avant de se retourner vers sa cavalière en se désintéressant volontairement du chasseur.
« Pardon du retard ! » Un sourire désolé s'afficha sur le visage de l'hyperactif.

Stiles se détendit aussitôt lorsque Lydia lui fit signe qu'il était déjà tout pardonné de son retard, saisissant sa main pour presser sa paume contre la sienne, ce qui l'apaisa dans la seconde. Il la regarda pointer son index contre le torse de l'oncle Hale, refusant sèchement la danse qu'il lui avait réclamé et malgré la fureur apparente de la rousse, Stiles ne plus s'empêcher de réprimer un sourire moqueur à l'égard du vieux loup. Sourire qu'il s'empressa de masquer lorsque Lydia se retourna vers lui, celle-ci affichait un sourire tendre sur son visage et posa une main sur la joue du garçon. Stiles posa sa main par-dessus cette dernière en lui adressant son plus beau sourire. Il était à la fois soulagé qu'elle ait envoyé balader le loup et  affligé d'avoir pu penser qu'elle accepterait la demande de l’ancien Alpha. « Je t'aurais jamais abandonné avec lui qu'est-ce que tu crois ? » Sourit-il avant qu'elle ne dépose un baiser sur ses lèvres. De la surprise traversa les yeux du brun avant qu'il ne les fermes pour apprécier chaque seconde durant lesquelles ses lèvres étaient contre les siennes. Les derniers moments dans la chambre d’hôpital en compagnie de la rousse n’étaient finalement pas si illusoires qu’il n’aurait pu le croire.

Mais alors que la banshee, après avoir rompu le baiser, l'invitait à venir danser avant que Peter ne se montre plus insistant, Stiles reconnu une voix féminine qui s’était faite entendre derrière lui. Il ne se dérangea pas pour voler un dernier baiser à la rousse avant de se retourner vers la nouvelle venue. Stiles regarda la jeune fille vêtue d’une sublime robe rouge et noire, son visage masqué laissait apparaître un sourire léger. Il ne lâcha pas pour autant la main de Lydia même s’il savait parfaitement  qui était celle qui lui faisait face, il ne se cacherait pas de cette dernière, et il ne voulait pas la détester même s’il avait essuyé de nombreuses disputes avec elle avant de finalement rompre. « Merci Malia, je te retourne le compliment. »

Stiles ne savait pas vraiment quoi ajouter de plus, ce n’était pas que la présence de le brune le gênait tant que ça mais il ne savait tout simplement pas quoi lui dire. Ce n’était pas comme si il lui avait beaucoup adressé la parole ces derniers temps, leur relation s’était, en quelque sorte, essoufflée. Stiles se tourna vers Lydia sans plus de cérémonie et lui adressa un sourire presque impatient, après tout, elle lui avait promis une danse. Et ses paroles suivirent ses pensées. « Tu m'as parlé d'une danse et j'ai pas vraiment envie d'attendre que tu changes d'avis. Tu viens ? » Il fit mine de l'entraîner vers la piste de danse tout en l'observant du coin de l’œil pour vérifier si elle n'avait pas remis sa décision à plus tard à cause de la nouvelle arrivante.

La gêne qu’avait provoquée la nouvelle arrivante ne s’était pas fait ressentir que chez Stiles, sa cavalière paressant tout aussi mal à l’aise. Et même si sa voix semblait plus confiante que ce qu’elle était réellement, Stiles n’en parut pas plus rassuré, il tenait aux deux jeunes femmes, elles comptaient beaucoup pour lui et ne voulait blesser ni l’une ni l’autre sans pour autant renoncer à ce qu’il avait toujours ressenti pour la rousse. Autant dire que ses pensées s’entremêlaient, au point de créer un conflit trop important pour que Stiles puisse le résoudre maintenant. Peut-être que lorsqu’il aura récupéré ses heures de sommeil, il pourra analyser un peu mieux la situation et savoir quoi dire mais pour le moment il en était juste incapable, maudissant intérieurement son cerveau un peu trop hors service à son goût.

Stiles caressa du pouce le dos de la main de Lydia qui avait resserré son emprise autour de la sienne, le ramenant au moment présent. Rien que ce contact le détendit un peu plus encore, une envie de bouger lui prit comme pour évacuer le soudain malaise qui s’était installé depuis l’arrivée de la brune. Préférant reporter la mise au point sur la situation entre eux trois, Stiles insista pour entraîner sa cavalière sur la piste de danse et celle-ci accepta, pour son plus grand bonheur. Elle avait peut-être traîné un peu, saluant Malia d’un signe de main avant de la gratifier d’un sourire. Le brun prit conscience à ce moment qu’il n’avait pas été des plus agréables avec la coyote-garou et tenta de se rattraper dans un sourire plutôt maladroit tout en lâchant un : « On se revoit plus tard. » avant de la laisser là.

Les bras de Lydia ne tardèrent pas à se poser sur ses épaules, entourant son cou alors qu’elle posait sa joue contre son épaule dans un soupir. Ce fut plutôt contagieux puisque soupira à son tour, plus d’aise dans son cas, tout en enfouissant son visage dans le cou de la jeune femme, glissant ses mains le long de la taille de sa cavalière. En sentant le visage de Lydia quitter son épaule, il redressa la tête, soutenant son regard émeraude qui le fixait. Il laissa échapper un petit rire alors qu’elle vint se dresser sur la pointe des pieds pour joindre ses lèvres aux siennes, manquant de tomber. Il resserra son emprise autour de sa taille pour la stabiliser dans un sourire en se penchant vers elle en posant délicatement son front contre le sien. « C'est pas le moment de s'étaler par terre. » Sourit-il dans un souffle.

Elle lui rappela leur dernière danse avant celle-ci, bien sûr qu’il s’en souvenait ! Lui qui avait tant insisté pour qu’elle lui accorde cette dernière, trouvant les bons mots en disant simplement le fond de sa pensée. Et bien sûr qu’il avait été heureux qu’elle lui accorde toute cette attention, il n’avait demandé que ça depuis des années, pas question qu’il laisse tomber sa chance au moindre obstacle. Il esquissa un sourire attendri, qu’elle s’en souvienne aussi bien que lui ne pouvait le rendre plus heureux. « Et moi donc, t’imagines combien de fois j’avais rêvé de ça à l’époque. Et puis c’était pas si dur, il suffisait juste d’observer un peu plus. Cette fois où t’as résolu ce problème de maths au tableau tout en tenant la conversation à Scott sans même chercher à réfléchir par exemple. Je pourrais t’en citer plein en fait, mais après tu vas vraiment me prendre pour un taré, genre stalker et tout… Et je te promets c’était pas le cas ! » Lâcha-t-il dans un rire.

Il était tellement pris dans ses souvenirs qu’il ne perçut pas tout de suite la silhouette qui se glissait derrière Lydia et lorsqu’il la ressentit finalement, il était déjà trop tard. Sa tête s’était redressée pour faire face au dépeceur et son visage se crispa aussitôt alors que les mains de Lydia se détachaient de lui et qu’une voix vint l’arracher à la réalité l’empêchant de tout mouvement. « Seigneur, nous avons des ennuis. » Ricana-t-elle dans sa tête, arrachant un frisson à l’humain. Dans un effort qui lui sembla presque impossible Stiles parvint à le chasser de là, il connaissait déjà les propositions de ce dernier, et elles se faisaient actuellement beaucoup plus alléchantes. Un peu plus de pouvoir mais à un prix un peu trop important pour lui. Ne jamais croire un renard, il le savait, il fallait qu’il trouve une  autre alternative. Mais alors qu’il se frayait un chemin entre les différents danseurs amateurs dans la direction où il avait vu Lydia se faire emporter, il perçut sa voix, un cri, son nom puis plus rien, le vide complet.

« Ne t’en fais pas, on va la sortir de là ta dulcinée, je dois bien ça à mon hôte préféré. » Le regard de Stiles s’était assombri, toute trace de peur avait disparue de ses yeux et un sourire vint s’étendre sur son visage alors qu’il descendait à la chaufferie sans la moindre hésitation sachant déjà ce qu'il y trouverait. La rousse semblait apeurée tandis que le plus vieux affichait un sourire satisfait, ne s'attendant certainement pas à ce que le renard se glisse derrière un air suffisant sur son visage. « Tu devrais savoir que ce joli minois nous appartient. » Susurra-t-il à l'oreille de l'oméga avant de l'envoyer s'écraser contre un mur sans sourciller. Au moins il avait tenu cette parole ci, il avait aidé la rousse à s'échapper d'entre les griffes du loup, il avait fait suffisamment de bien pour tout un siècle -peut être même deux. Il baissa la tête vers le loup inconscient, laissant échapper un rire malsain avant de relever les yeux vers la rousse. « Pas la peine de nous remercier, il se pourrait même que tu regrettes cette intervention... » Sourit le renard en s'approchant lentement de la jeune fille.