Ses yeux s’ouvrent soudainement. Etalée sur un sol poussiéreux. Elle inspire et la saleté la fait tousser. Un marteau semble s’abattre sur son crâne, la forçant à grimacer de douleur. Elle git sur un sol froid au toucher même si ce n’est pas ce qui la perturbe le plus en cet instant. Plutôt cette odeur… Une odeur qu’elle connaît et qui ne présage jamais rien de bon… Que fait cette foutue odeur chez les Hale ?! Et pourquoi se retrouve-t-elle allongée par terre comme ça ?! Les questions se bousculent à toute allure dans son crâne à peine ses yeux ouverts, découvrant une lumière vacillante se projetant sur des murs délabrés. Des murs qu’elle ne reconnaît pas. Bien trop bas et sombres pour être ceux du logement de son frère qu’elle squatte gentiment depuis son retour. La surprise de ce réveil soudain est vite remplacée par un trouble qu’apprécie très peu la louve… Son instinct la pousse à redresser la tête, appuyée sur ses deux mains, balayant vivement l’endroit de son regard. Elle ne reconnaît en rien cette pièce.
« Qu’est-ce que… »
Grogne-t-elle en sentant son crâne vibrer d’autant plus violemment. Portant une main à sa tempe, les yeux plissés pour tenter, tant bien que mal, de chasser cette douleur bien trop désagréable au goût de la jeune fille, son ouïe siffle, accentuant le pénible de cette situation. L’odeur s’intensifie au fur et à mesure que ses sens s’éveillent, rendant ce réveil d’autant plus déplaisant qu’il ne l’est déjà.  La cadette des Hale distingue alors une odeur bien moins appréciable. Celle d’un corps en décomposition. Elle sert sa mâchoire, ses paupières se ferment l’espace d’une seconde. Elle avait été idiote de penser pouvoir dormir paisiblement ici, à Beacon Hill. A croire qu’elle s’était ramollie en s’absentant de cette petite ville bien mouvementée.
Mais l’heure n’est clairement pas à se lamenter ou à s’attarder à se blâmer d’avoir manqué de précaution. Elle pourra ruminer plus tard, pour l’instant elle relevait son regard pour fixer le corps livide qui se dressait, pendu à une croix de bois sombre, à quelques pas d’elle. Elle hausse un sourcil. Qui que ce soit qui ait tué ce type il avait le sens de la mise en scène.
Son regard s’attarda sur le macchabé. A l’odeur qu’il dégageait, à la couleur de sa peau, celle de ses lèvres et le sang pâteux séchant la plaie béante laissée sur sa gorge, il était exposé ici depuis un petit temps… Elle ne le reconnut pas. D’un côté cela eut l’art de la rassurer. Il ne manquerait plus qu’elle tombe nez-à-nez avec l’un des membres de la Dream Team de Beacon Hill… Pas que ça l’aurait étonné, vu l’art qu’ils ont (certains plus que d’autres) à se mettre dans des situations plus que cocasses, mais ça l’aurait, malgré tout, bien plus énervée qu’elle ne l’était déjà. Car oui, bien que Cora ne soit déjà pas d’ordinaire la plus enthousiaste et souriante qu’il soit, le fait de se réveiller dans un endroit inconnu, avec un mort pour l’accueillir est loin d’être sa tasse de thé. C’est alors qu’elle remarque des écritures au-dessus de la tête de la victime. QUI EST LE COUPABLE ? Certes… Le clown qui l’avait dérangée dans son sommeil s’est définitivement trompé de vocation…
Elle baisse de nouveau son regard pour remarquer quelque chose traînant au milieu des bougies à la lumière chaude. Elle se redresse, désormais accroupie, ses sens en éveil, prête à s’approcher lorsqu’elle entend un gémissement. Elle se retourne tout aussi vivement que ce fichu mal de crâne le lui permet. Derrière elle, allongées au sol, deux filles s’éveillent.
« Si c’est comme ça que se déroulent les soirées pyjamas à Beacon Hill désormais, alors cette ville a carrément mal tournée… »
Grogne-t-elle, ne quittant pas des yeux ces deux filles, pas plus rassurées d’avoir de la compagnie. La raison est simple. Qu’est-ce qui lui dit que l’une d’elle ne joue pas la comédie et est l’auteure de tout ce cirque ? Instinctivement, elle fouille ses poches, avant de soupirer, exaspérée d’elle-même. Il faut être vraiment niais pour penser que quelqu’un l’aurait transportée de son lit à cet endroit paumé en prenant soin de lui laisser son téléphone, histoire qu’elle contacte son frère… Décidément pas du matin, son humeur ne cessait de sombrer, en rien aidé par cette odeur réchauffée par la chaleur des bougies.  

Léonie aimait dormir, elle avait un sommeil profond et mouvementé, il était toujours dificile de la tirer de son sommeil quand elle se décidait à dormir. Et elle n'était jamais de bonne humeur quand elle devait en sortir contre son gré, elle avait même parfois l'habitude de dire qu'il y avait plutôt intérêt d'y avoir mort d'homme... Elle ne croyait pas si bien dire. Le froid fut ce qui la réveilla, celui ci lui brûlait la peau, Léonie était pas vraiment frileuse, mais quand il s'agissait de dormir, elle s'enroulait dans sa couette comme un sushi géant. Au tant dire que dans le cas actuel, où elle se trouvait allongée à même le sol avec juste son T-shirt Ananas trop grand pour elle, et son shorty sur les fessiers, y avait de quoi se plaindre et d'avoir froid. Elle bougea dans un grognement, persuadé de s'être cassée la figure de son lit pendant son sommeil. Quelle fut sa surprise quand elle s'aperçut que le sol était bien trop froid pour être le parquet de sa chambre douillette et que sa couette n'était pas à proximité de main. « C'est quoi cette blague... » Marmonna-t-elle, d'un ton pas réveillé. Elle papillonna des yeux alors que sa tête lui faisait un mal de chien, la pièce où elle se trouvait était éclairée par quelques bougies et elle se redressa en sursaut quand elle s'aperçu qu'elle n'était pas seule. Une brune était déjà pleinement éveillée, à peine aussi grande qu'elle, à peine plus large aussi. Mais Léonie décida de rester aussi méfiante que l'autre paraissait l'être, son regard se posa ensuite une autre fille qui somnolait encore, qui somnolait beaucoup trop bien d'ailleurs. Alors la druide se décida de s'avancer jusqu'à elle, non sans guetter le moindre mouvement suspect du corps endormi, pour, une fois arrivée à sa hauteur, la secouer comme un prunier. « C'est plus vraiment le moment de dormir là ! On est au beau milieu de... » Elle se stoppa avant d'adresser un nouveau regard à la brune, pour lui adresser finalement la parole. « On est où en fait ? » Et, comme Léonie avait l'habitude de faire, elle entreprit de trouver la réponse à sa question d'elle même. Elle ne l'a trouva pas vraiment, mais elle trouva mieux, enfin tout dépendait de quel point de vu on se plaçait. Un corps. Un corps humain. Obviously. Le truc était tout blanc, en train de pourrir et baignait dans son sang. « Eurk. » Fut sa seule réaction. Son nez bouché dû à son rhume lui aurait au moins servit à quelque chose, ça lui aura évité de gerber à cause de l'odeur. « Et c'est quoi ça ? On en trouve même plus en magasin des trucs aussi vieux. » Pointant du doigt un vieux radio cassette dont elle ignorait si l'antiquité pouvait encore marcher. Elle l'attrapa sans guetter les réactions des autres et s'assit sur une chaise qui passait par là et tourna l'appareil entre ses mains. S'il était là lui aussi ce n'était certainement pas un hasard.

Cora laissa à la première éveillée, celle au t-shirt d’Ananas, s’occuper de la deuxième fille afin de la sortir du pays des songes où elle semblait bien se sentir. Désolée miss, c’est pas l’heure de rêver, l’heure est plutôt au cauchemar... Elle haussa un sourcil aux questions de l’Ananas :
« J’ai l’air d’en savoir plus que toi peut-être ? »
Elles se trouvaient toutes les trois dans le même bateau, du moins elles semblaient l’être... En pyjama dans un lieu qui leur était inconnu. Sympa le réveil. Alors que l’Ananas s’intéressait à l’engin, Cora continuait de fixer celle qui avait été violemment réveillée. La rousse avait revêtu un air dégoûté en découvrant le corps. Comment lui en vouloir ? Ce n’est pas ce qu’il y a de plus sympathique à découvrir avant un petit-déjeuner…  C’est alors qu’elle se mit à vomir. Décidément, la matinée ne faisait qu’aller en s’améliorant… Elle s’excusa et Cora lança :
« Ça va mieux au moins ? »
Question con, comment ça pouvait aller mieux alors qu’aucune d’elles ne savaient où elles étaient, ni même ce que foutait ce fichu cadavre ici, exposé avec une telle mise en scène devant elles… La rousse et la brune s’intéressaient au radiocassette, la jeune louve était elle-même intriguée et s’approcha pour les regarder tripoter l’objet dans tous les sens, ce jusqu’à ce que la rousse ait le cran de faire ce que toutes trois attendaient certainement. Appuyer sur le bouton de lecture…
‘Chers petits pions’ ?! Déjà le début ne plaisait guère à la brunette, à quoi s’attendre de plus ? A une jolie chanson ? A une blague d’on ne sait quel retardé pullulant à Beacon Hill ? C’était loin de l’être, du moins, un retardé oui, mais qui s’y croyait carrément. Elle se tut, son expression suffisait à faire comprendre comment elle se ressentait d’être ainsi traitée, mais elle continua d’écouter, essayant de ne pas prêter attention à la tension d’autant plus lourde qui s’était installée dans l’endroit depuis la lecture de l’enregistrement.  De qui pouvait-il bien parler en utilisant ce ‘nous’ tout autant dérangeant ? Quoique… Pas autant que la suite de son message…
L’enregistrement prit fin et un silence pesant s’installa de nouveau dans la pièce. Cora continua de fixer le radiocassette. Elle n’avait pas reconnue cette voix sombre, en un sens, ça l’aurait rassurée… Qu’est-ce que tout cela voulait bien dire ? Son regard s’attarda ensuite sur la victime qui pendait toujours à la croix. Une d’entre elles avait fait le coup ? La jeune louve n’était pas convaincue… Aucune ne semblait être coupable, pourtant, la méfiance résidait pour la simple et bonne raison qu’un visage peut cacher bien des choses. Tout le monde le sait, il ne faut pas être niais. Mais qui ? L’Ananas qui ne savait pas comment fonctionne un simple lecteur cassette ? Ou celle qui venait de dégobiller rendant l’endroit d’autant moins plaisant qu’il ne l’était déjà ?
« Donc l’une d’entre nous a fait le coup ? Qui que ce soit, merci de nous avoir foutu dans un tel bordel… »
Grogna-t-elle en regardant les deux jeunes filles. Elle n’allait pas jouer les agréables. Les deux autres devaient tout autant se montrer méfiante à son égard… Loin de plaire à Cora d’être prise pour une possible responsable du meurtre… Elle savait ne pas être coupable, s’en foutait de ce qu’en pensaient les deux autres. Pourquoi elle serait allée perdre son temps à tuer ce type ? Elle ne le connaît pas, elle se serait souvenue s’il lui avait causé des torts. Puis surtout, elle se serait souvenue si elle avait tué quelqu’un. Mais telle mise en scène ? Carrément pas son style à ce qu’elle sache…
‘Le chrono est bientôt lancé’… ça ne présageait rien de bon, loin de là. Les soucis allaient s’intensifier, pour sûr…
« Ce type dit quelque chose à l’une d’entre vous au moins ? »
Ajouta-t-elle en montrant d’un signe de tête le cadavre. Elle n’en accusait pas une en particulier, elle doutait toujours, comment en pointer une du doigt alors qu’elles se retrouvent toutes les trois dans la même galère et qu’en plus, elles ne savent rien les unes des autres. Du moins, c’est ce qu’en déduisait la louve, vu comment l’autre brune avait réveillé la rousse.

Si Léo avait su que la rousse gerberait à son réveil, elle l'aurait sûrement laissé dormir un peu plus longtemps, ça lui donnait l'envie de vomir par dessus, mais heureusement, encore une fois, son rhume lui sauvait la mise, masquant toujours l'odeur désagréable qui s'était certainement amplifiée avec le dégobillage de la rousse à présent. Au moins s'était elle excusée et Léonie compatissait déjà avec la dernière réveillée qui avait certainement envie d'un bon brossage dentaire après ça. Dans tous les cas, Léo constatait que ni la brune, qui avait pas l'air des plus aimable qui soit, ni vomito, qui semblait complètement paumée, ne semblait savoir où elles se trouvaient toutes les trois. Elle n'était pas donc plus avancée, et décidait déjà de prendre les choses en mains, n'ayant pas l'intention de rester trop longtemps dans cet endroit pourri. Léonie avait encore l'intention de finir sa nuit, dans son lit, sous sa couette et bien au chaud. Léo s'était donc emparé du petit lecteur le faisant tournoyer entre ses mains, sans savoir s'il fallait qu'elle le mette en route ou non. Mais la rousse ne lui laissa pas vraiment le choix d'y réfléchir plus longtemps puisque cette dernière le déclencha sans demander l'avis de personne. Il aurait très bien pu lui exploser à la figure, ce que Léo se demanda pendant une seconde avant de percevoir le son qui s'en échappait, un toussotement et enfin un ravissant monologue qui vous mettait dans l'ambiance. Léo fronça des sourcils à multiples reprises durant le discours de l’autre narcissique dont la voix s’échappait de l’antiquité.

Elle peinait à comprendre en quoi les deux comparses qui se trouvaient avec elle pouvait bien avoir quelque chose avoir avec ces meurtres. La brune, qui s’était tût jusque là se décida à mettre autant l’ambiance que le narcissique du radio-cassette. Soit, affirmé tout haut ses soupçons envers les deux autres, elle n’avait pas complètement tort, c’était bien ce qu’avait affirmé l’homme de la cassette. Mais Léonie voyait les choses autrement, ce trou du cul n’était pas foutu de montrer le bout de son nez et vu son numéro avec toute cette mise en scène, le seul truc qui lui paraissait clair et limpide c’est que le méchant de l’histoire, c’était bien ce guguss dont elle n’avait pas reconnu la voix. Et c’est bien pour ça que, même si elle n’avait pas daigner montrer l’intérêt de répondre à la première interrogation de la brune, elle pris la peine de répondre à celle ci. « Aucune idée de qui pourrait bien être ce type, mais y a une chose est sûre, c’est que c’est lui le méchant. » Léo regarda les deux autres tour à tour avec un air qu’elle voulait sérieux. Elle n’avait pas l’intention de s’entre-tuer avec elles, d’autant plus qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’elles étaient, et elle ne voulait pas le découvrir à ses dépends non plus. « J’ai pas franchement de participer à son petit jeu de chasse improvisée, ni de faire confiances à ses dires. Alors si vous voulez vous arrachez les tripes respectivement tant mieux pour vous, mais ça n’arrangera pas la croissance des meurtres dans cette ville. » Léonie s’arrêta, marquant un temps de pause de quelques minutes pour les laisser mesurer ses paroles. Observant tout autour d’elle durant celui ci, cherchant quelque chose, un détail, qui aurait pu lui échapper. Rien. Mise en scène parfaite. Ces types savaient définitivement ce qu’ils faisaient. Léonie lâcha un profond soupir avant de conclure. « On devrait peu être commencer par essayer de sortir d’ici ? »